Le 19 novembre 1918, quelques jours seulement après l'armistice de la Première Guerre mondiale, le conseil municipal de la ville de Sète - qui s'écrit CETTE à  l'époque - décide de construire un monument  en souvenir des soldats sétois morts au combat. 1041 Sétois sont morts pendant la guerre, la moitié avait moins de 26 ans.

C'est le projet intitulé « Le sacrifice » du sculpteur Marius Roussel, né à Sète et qui a combattu à Vauquois près de Verdun, qui est retenu. Le monument arrive en bateau au port de Sète en janvier 1923. Il est installé dans un très beau jardin public en plein centre ville, au pied du Mont Saint-Clair, et inauguré en août 1923.

Long de 7m et haut de 4m, ce monument en marbre est composé d'un mur rectangulaire portant l'inscription «  AUX ENFANTS DE CETTE MORTS POUR LA FRANCE » gravée en lettres dorées, devant lequel on peut voir un groupe de statues : un soldat saluant le corps d'un ami qu'une femme pleure.

Au centre, un homme en uniforme est allongé, mort :  il porte un casque adrian en acier sur la tête, un manteau épais, une gourde, et une ceinture à laquelle sont accrochées ses cartouchières. C'est un poilu. Il représente tous les soldats morts à la guerre qui se sont sacrifiés comme lui.

Le soldat debout qui salue est représenté en uniforme lui aussi.  Son fusil est posé au sol. Son regard est tourné vers son camarade allongé par terre. Il tient un morceau du linceul qui va recouvrir le mort. Ce soldat représente l'hommage des combattants survivants à tous ceux qui ont perdu la vie à la guerre.

De l'autre côté se tient une femme. Elle est à genoux près du soldat mort, effondrée. D'une main elle effleure le buste du soldat allongé, de l'autre elle semble étouffer un sanglot. Un long voile lui recouvre la tête et le dos. On ne peut pas voir son visage.  Qui est-elle ? La mère qui a perdu son fils, l'épouse qui a perdu son mari, la fille qui a perdu son père ou son frère ? Elle symbolise un peu tout ça à la fois, le chagrin de la ville entière, du pays entier qui n'oublie pas ceux qui sont morts à la guerre pour que nous puissions vivre dans la paix.

Parmi les poilus sétois, nous avons retrouvé la trace de Louis Vaillé, plusieurs fois vainqueur des joutes de Sète, qui est rentré gravement gazé de la guerre. Nous avons imaginé ce qu'il aurait pu répondre à nos questions...

Elève: Louis Vaillé, qu'avez-vous ressenti quand la guerre a éclaté?

Louis Vaillé: J'ai ressenti la peur que l'Allemagne gagne mais aussi la peur d'être mobilisé. Je n'avais pas envie de faire la guerre.

Elève: Qu'est-ce qui vous embêtait le plus dans les tranchées?

Louis Vaillé: Les poux, impossible de s'en débarrasser, et les rats, ils nous empêchaient de dormir et volaient le peu de nourriture que nous avions.

Elève: Comment vous faisiez pour manger dans les tranchées?

Louis Vaillé: C'était compliqué. Un soldat était désigné pour aller chercher le ravitaillement. C'était dangereux. Parfois il ne revenait pas...

Elève: Vous avez été blessé?

Louis Vaillé: J'ai reçu ma première blessure en mai 1915 à la tête à cause d'une bombe. J'ai vu la bombe que les Allemands tiraient, je me suis baissé, ensuite je me suis relevé pour voir les dégâts. Je n'ai pas vu que les Allemands tiraient une deuxième bombe.

Elève: Où avez-vous vu le plus de bombes?

Louis Vaillé: En 4 ans, j'ai vu beaucoup de bombes, mais à Verdun, j'en ai vu beaucoup plus. C'est là que j'ai perdu beaucoup de compagnons d'armes.

Elève : Vous avez perdu beaucoup d'amis à la guerre?

Louis Vaillé: Oui, beaucoup. Alors à  la fin de la guerre, à chaque fois qu'un train ramenait à Sète le corps d'un copain, je l'attendais sur le quai de la gare en tenue de jouteur.